Lettre "N"
NA->NER   NES->NH
NI->NN   NO->NONN
NONO->NOR   NOS->NV

[NOS->NV]

NOSCE TE IPSUM
Connais toi toi-même.
C'était la maxime favorite de Socrate. Diogène Laërce l'attribue à Thalès ; Antisthène l'attribue à une ancienne sibylle nommée Phémonoé, et il accuse Chilon de se l'être injustement appropriée. Quoi qu'il en soit, Socrate fut le premier qui la fit valoir. Il l'adopta, l'expliqua, et la rendit célèbre. Jamais maxime n'a été plus répétée. On sait qu'elle était écrite sur le fronton du temple de Delphes. Toute la loi morale est renfermée dans ces deux mots, comme toute la loi religieuse est renfermée dans ces paroles de Jésus-Christ : Aime ton prochain comme toi-même. Sénèque le tragique a développé cette belle maxime en deux vers sentencieux que Nicole a traduits ainsi :
Qu'un homme est malheureux à l'heure du trépas,
Lorsqu'ayant oublié le seul point nécessaire,
Il meurt connu de tous, et ne se connaît pas !
Il y a bien peu d'hommes qui arrivent à une conscience complète d'eux-mêmes ou qui se connaissent à fond. La connaissance de soi a été dans tous les temps l'objet principal des vrais philosophes : Nosce te ipsum.
BAUTAIN
C'est une bien vieille vérité que celle qui fonde toute la morale sur le Nosce te ipsum.
DAMIRON
De tout temps l'homme a été porté à s'observer pour se connaître, et, chez les anciens comme chez les modernes, le nosce te ipsum a été la première condition de la science philosophique.
BAUTAIN
Philosophie morale
Boileau avait plus que personne le droit de recommander aux hommes la connaissance de soi-même : nul ne s'est mieux connu et apprécié qu'il ne fit. Il savait ce que valait son âme et ce que pouvait son génie, il avait obéi de bonne heure à l'ordre de l'oracle : Nosce te ipsum.
GERUZEZ

NOVE SED NON NOVA
La manière est nouvelle, mais non la matière.
L'enseignement de l'Église offre à tous la même nourriture, le pain de vie sous des formes et avec des saveurs diverses ; à tous il dit les mêmes vérités d'une manière différente, suivant l'état de chacun ; il dit toujours la même chose et toujours d'une manière nouvelle. Nove sed non nova.
BAUTAIN

NOVISSIMA VERBA
Dernières paroles.
Ces deux mots désignent ordinairement dans les auteurs anciens, les dernières paroles d'un mourant. Ils ont un autre sens dans un vers de Virgile (Énéide, liv. VI, v. 231) : Lustravitque viros, disitque novissima verba.
Il s'agit ici d'une cérémonie funèbre ; le prêtre jette sur les assistants l'eau lustrale et prononce les dernières paroles, c'est-à-dire les derniers adieux : c'était le mot Vale, adieu ! répété trois fois.
Nous savons quelle circonstance particulière, quel site, quel état de l'âme, quel spectacle, quelle joie ou quelle douleur a provoqué chacune de ces méditations de Lamartine, qui ont été les novissima verba de la poésie moderne.
Edmond TEXIER
Pour nous, le monologue d'Ajax (dans l'Ajax furieux de Sophocle) serait trop long au moment où il est prononcé, mais voilà ce que les Anciens appelaient novissima verba, les dernières paroles, les paroles de mort qui avaient chez eux une sorte de sanction religieuse.
LA HARPE
Cours de littérature
Le cinquième acte de Macbeth nous paraît le plus véritablement beau, justement parce qu'il ne présente pas autant d'appareil scénique que le second et le troisième. Les derniers moments, les novissima verba de Macbeth, offrent un spectacle plein de grandeur. Ainsi la torche ardente redouble d'éclat avant de s'éteindre.
J. JANIN
Littérature dramatique

NULLA DIES SINE LINEA
Aucun jour sans tracer une ligne.
Pline rapporte qu'Apelle se livrait avec tant de zèle à son art, qu'il ne passait pas un jour sans toucher son pinceau ; ce qui donna lieu au proverbe : Nulla dies sine linea.
Depuis six ans, livré à l'étude, j'ai voulu qu'il ne se passât aucun jour sans ajouter quelques épis à la gerbe déjà rassemblée, nulla dies sine linea.
Galerie de littérature
Nulla dies sine linea. Ce que Pline a dit du plus grand peintre de la Grèce, l'histoire de la sculpture le dira de Bouchardon.
GRIMM
Correspondance littéraire

NUMERO DEUS IMPARE GAUDET
Les Dieux aiment les nombres impairs.
Virgile (Égloge VIII, v. 75) fait allusion aux propriétés mystiques que l'Antiquité attribuait aux nombres impairs. Dans le système de Pythagore, l'unité représentait la divinité, qui contient tout et de qui tout découle ; le nombre 2 était le mauvais principe, et le nombre 3 le symbole de l'harmonie parfaite. Les Anciens buvaient trois fois en l'honneur des trois grâces, et crachaient trois fois pour détourner les enclantements ; le gouvernement du monde était partagé entre trois dieux : Jupiter, Neptune et Pluton. Diane avait trois visages. Il y avait trois Parques, trois Furies, trois Grâces. Cerbère avait trois têtes. Enfin, dans les sacrifices, on faisait trois fois le tour de l'autel, on nouait en trois un ruban, on coupait trois poils du front des victimes, etc., etc.
Les nombres ont exercé une certaine influence sur les esprits enclins à la superstition ; l'unité marquait le caractère sublime de la divinité, les nombres impairs, et entre autres le nombre trois, étaient en grande vénération chez les Anciens ; ils étaient consacrés aux choses divines : Numero Deus impare gaudet.
LOUVET
Encyclopédie des gens du monde
J'ai vu un moine, dit Bordeu, qui ne mettait point de terme aux saignées : lorsqu'il en avait fait trois, il en faisait une quatrième par la raison, disait-il, que l'année a quatre saisons, qu'il y a quatre parties du monde, quatre âges, quatre points cardinaux. Après la quatrième, il en fallait une cinquième, car il y a cinq doigts à la main. A la cinquième, il en joignait une sixième, car Dieu créa le monde en six jours. Six ! Il en faut sept, car la semaine a sept jours, comme la Grèce eut sept sages. La huitième nécessaire parce que le compte est plus rond. Encore une neuvième, parce que numero Deus impare gaudet.
Dr Isidore BOURDON
Que le nombre des convives ne soit pas moins de trois ni plus de neuf ; il y en a qui disent qu'on peut le porter jusqu'à douze, mais nous croyons que c'est un mauvais nombre : Numero Deus impare gaudet.
JULES JANIN

NUNC DIMITTIS SERVUM TUUM
Maintenant vous pouvez congédier votre serviteur.
Siméon, vieillard juif, averti par le Saint-Esprit qu'il ne mourrait qu' après avoir vu le Messie, se trouva dans le Temple au moment où la Vierge y apporta le divin enfant. C'est alors qu'il entonna le cantique que l'Église chante le dimanche à Compliss : Nunc dimittis servum tuum, Domine.
Une vieille tour indique le lion où demeurait Siméon, l'homme juste, le fidèle serviteur de Dieu, qui attendait la consolation d'Israël, et qui, en prenant l'enfant Jésus dans ses bras, entonna son cantique d'actions de grâce : Nunc dimittis servum tuum, Domine.
X. MARMIER
La voix grave et sévère de Louise accompagnait la voix claire et limpide d'Anna, comme l'orgue accompagne la voix des enfants de choeur. C'étaient alors des extases si terribles et si douces entre nous trois, que plus d'une fois je n'ai pas fait au Ciel d'autre prière : Nunc dimittis - C'est maintenant qu'il faut nous rappeler à toi, ô mon Dieu !
Jules JANIN
A ces mots, le roi Charles serra affectueusement la main du vieillard, salua Alice et tout ce qui l'entourait et se retira. Sir Henri Lee, après l'avoir écouté avec un sourire qui prouvait qu'il entendait les paroles gracieuses qui lui étaient adressées, tourna le dos et murmura le nunc dimittis.
Walter SCOTT
La vieille dame se laissa retomber sur sa chaise, et tandis que son fils couvrait de baisers et de larmes au mains, ridées, elle se mit à réciter d'une voix émue le cantique du vieillard Siméon : Nunc dimittis servum tuum, Domine.
Walter SCOTT
Aymé Verd

NUNC EST BIBENDUM
C'est maintenant qu'il faut boire, se réjouir (HORACE, liv. I, ode XXXI, vers 1).
Cette ode fut composée à l'occasion de la victoire d'Actium : Nunc est bibendum, nunc pede libero pulsanda tellus (Maintenant il faut boire, maintenant il faut frapper la terre d'un pied léger).
Hugues Verd écouta la discussion en servant à boire à la ronde sans s'oublier, et la termina en disant : « Ventre Mahon ! bien tué ou mal tué, le coquin est mort, c'est là tout ce qu'il me faut ; je n'aurais pas été fâché d'aider sa vilaine âme à déménager ; mais puisque le diable a emporté l'oncle et les neveux, il ne nous reste plus qu'à dire avec notre ami le bachelier : Nunc est bibendum? etc., etc... Voyons, aidez-moi donc, sire clerc ; êtes-vous homme à laisser ainsi un verre à sa plus belle moitié ? - C'est juste, pater Anchises (père Anchise), repartit le bachelier : Nunc est bibendum, nunc pede libero pulsanda tellus.
Walter SCOTT
Aymé Verd
Les conviés entrechoquent des verres ; ils portent des santés, ils ont avec eux un tambour et des trompettes qui font un vacarme d'enfer. Morose s'enfuit au grenier, met vingt bonnets de nuit sur sa tête, se bouche les oreilles. Les conviés crient : « Battez, tambours ; sonnez, trompettes. Nunc est bibendum, nunc pede libero. - Misérables ! crie Morose, assassins, fils du diable, que faites-vous ici ? »
H. TAINE

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