Lettre "T"
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TUA RES AGITUR
Il s'agit de vous (HORACE, liv. I, ép. XVIII, vers 80).
Nam tua res agitur, paries quum proximus ardet (Votre intérêt est en jeu, quand la maison du voisin brûle).
A l'époque des disputes entre les réalistes et les nominaux, on rapporte qu'Abélard, appelé pour cause d'hérésie devant le concile de Sens, ayant aperçu parmi ses juges Gilbert de la Porrée, l'apostropha par ce vers d'Horace : Nam tua res agitur, paries quum proximus ardet ; prophétie qui ne devait pas tarder à s'accomplir ; car, quelques années plus tard, Gilbert, accusé d'hérésie à son tour, était appelé devant la concile de Paris.
L'orateur se fera écouter avec attention et bienveillance, s'il montre que l'intérêt commun est blessé, que l'humanité est outragée dans l'action dont il demande justice ; car ce n'est que par là que l'intérêt particulier est touchant pour les autres hommes : Nam tua res agitur, paries quum proximus ardet.
Victor LECLERC
Posteri, posteri (peuples futurs !), vestra res agitur ! J'ai toujours été frappé de cette inscription qu'un voyageur dit avoir rencontrée en montant au Vésuve. C'était sur le bord de la lave, à la limite d'une ancienne inondation du volcan ; on avait relevé une colonne pour y écrire ces mots solennels.
Pierre LEROUX
Humanité
Lisez cette histoire, m'avez-vous dit, et vous m'en direz de bonnes nouvelles ; vous verrez comment la littérature contemporaine est traitée ; vous allez apprendre toutes les déceptions et tous les crimes de cette vie littéraire que vous aimez tant. Lisez donc, ceci vous regarde, tua res agitur.
J. JANIN

TU ES ILLE VIR
Tu es cet homme.
David avait conçu une passion coupable pour Bethsabée, femme d'Urie, un de ses officiers. Afin de pouvoir l'épouser, il envoya à Joab, général de ses armées, qui assiégeait alors la capitale des Ammonites, l'ordre d'exposer Urie à l'endroit le plus périlleux. Celui-ci y fut tué, et David épousa Bethsabée. Mais bientôt Dieu lui envoya le prophète Nathan qui lui parla ainsi : « Il y avait dans une ville deux hommes, l'un riche, l'autre pauvre. Le riche possédait un grand nombre de brebis et de boeufs ; le pauvre n'avait pour tout bien qu'une petite brebis qu'il élevait avec ses enfants. Il la nourrissait de son pain, la faisait boire dans sa coupe et dormir sur son sein ; il la chérissait comme sa fille. Un étranger étant venu loger chez Ie riche, celui-ci ne voulut point toucher à ses brebis et à ses boeufs pour lui donner à souper, mais il prit la brebis du pauvre et la servit à son hôte. - Cet homme mérite la mort, s'écria David ; il rendra quatre brebis pour une. - Tu es ille vir « tu es cet homme, reprit Nathan. Tu as méconnu la parole de Dieu qui ta fait roi ; le Seigneur te punira. »
Pendant le carême de 1675, le Père Bourdaloue, expliquant un jour la parabole de Nathan en présence de Louis XIV, qui vivait alors avec la marquise de Montespan, osa la lui appliquer directement, et plus d'une fois dans son discours le terrible tu es ille vir retentit aux oreilles du souverain. Au sortir de la chapelle royale, Louis XIV demande ce que Bourdaloue a voulu dire. Les courtisans restaient muets, quand tout à coup le duc de Montausier, dont la rigide franchise ne connaît pas les ménagements, s'écrie : « Sire, il a dit à Votre Majesté : Tu es cet homme-là. »
CRÉTINEAU-JOLY
Maniée légèrement et avec dextérité, l'ironie est une arme permise ; on peut dire la vérité en riant. Cette arme est d'autant plus flagellante qu'elle cache, sous un voile mystérieux, le coup qu'elle porte ; on est frappé, on n'ose l'avouer, on craint l'application de cette maxime perfide : C'est toi qui l'as nommé, tu es ille vir.
Galerie de littérature

TULIT ALTER HONORES
Un autre en a eu l'honneur.
Seconde partie du vers de Virgile : Hos ego versiculos feci. Voir : Sic vos non vobis.
Il est évident que d'ici à très peu de temps la France devra reconnaître le nouveau royaume d'Italie. Il est déjà fâcheux qu'elle se soit laissé devancer dans cette reconnaissance par l'Angleterre et par la Suisse. Grâce à cette hésitation, si c'est elle qui fait la besogne, d'autres plus diligents en ont l'honneur, tulit alter honores.
A. GUÉROULT

TU QUOQUE !
Toi aussi !
Paroles que César fit entendre, lorsqu'il aperçut au nombre de ses assassins Brutus, qui passait pour être son fils.
Racine met ces mots dans la bouche de Mithridate :
Tout m'abandonne ailleurs ! Tout me trahit ici !
Pharnace, amis, maîtresse ; et toi, mon fils, aussi !...
Ainsi la fantaisie vous a pris de marier votre fille à un marquis... Quoi ! vous aussi !... tu quoque ! Si l'on m'avait demandé quel était l'homme le plus inaccessible à ces petites vanités, le plus supérieur à ces petits anachronismes, le plus incapable de continuer la dynastie éteinte des bourgeois-gentilhommes, j'aurais répondu sans hésiter : Durousseau !
DE PONTMARTIN
Le Fond de la Coupe
De tous les coups qui nous ont frappé pendant les malheureux neuf ans de notre pontificat, le plus sensible à notre coeur paternel a été celui que Votre Majesté nous a annoncé. Ainsi, vous aussi, mon fils, tu quoque, fili mi ; ainsi, le roi catholique, Charles III, qui est si cher à notre coeur, remplit le calice de nos souffrances, plonge notre vieillesse dans un torrent de larmes et nous précipite au tombeau.
Lettre du pape Clément XIII
M. Ampère a quelquefois traité avec trop de sans-façon cette pauvre vieille douairière qu'on appelle la poésie française, et qui, bien malmenée ailleurs, a le droit de dire comme César, à tout académicien lui manquant de respect : « Tu quoque ! »
DE PONTMARTIN
Causeries littéraires
C'est l'ingratitude, l'injustice, l'inhumanité de mon propre fils qui me navre le coeur ; je ne puis guérir cette blessure. Non seulement il a ruiné sa famille, mai il tue son père... Rien, depuis que j'existe, n'a dompté mon courage ; il fallait cela pour me vaincre : Tu quoque, fili !
Daniel DE FOE
Lettre à son gendre

TUTTI QUANTI
Et tous les autres.
Mots italiens, qui sont à peu près synonymes de la locution latine ejusdem farinae (VOIR cette locution), avec cette différence que cette dernière se prend toujours en mauvaise part.
Quoi, vous répondez sérieusement à ce fou de Rousseau, à ce bâtard du chien de Diogène ? Vous m'enhardissez ; je réponds, moi, à frère Berthier et à tutti quanti.
VOLTAIRE
A d'Alembert
Je l'ai lu, ce bel ouvrage, et ceux mêmes qui s'en alarment sont les premiers à admirer, le mot n'est pas assez fort, à se confondre d'admiration devant le beau génie qui leur a fait ce présent. Je vous nommerai MM. de Fontanes, Marcellus, le cardinal de Bausset, le duc de Richelieu, e tutti quanti.
Le vicomte de BONALD
Il y a longtemps que j'ai affaire à l'ingratitude et à l'envie. Je fuis les hommes et je m'en trouve bien ; j'aime mes amis et je m'en trouve encore mieux. Je voudrais vous revoir avant d'aller voir Pascal et Rabelais, et tutti quanti, dans l'autre monde.
VOLTAIRE
Lettre à M. Thiriot

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