Lettre "S"
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SUNT LACRYMAE RERUM ET MENTEM MORTALIA TANGUNT
Il y a des larmes dans les choses mêmes et ce qui est périssable frappe l'esprit (VIRGILE, Énéide, liv. I, v. 462).
Énée, fugitif, a été poussé par la tempête sur les côtes d'Afrique, aux lieux mêmes où s'élève Carthage. Dans un temple que Didon a consacré à la reine des dieux, un spectacle inattendu frappe les regards du héros : il voit représentés, dans l'ordre des temps, les combats d'Ilion et les événements de ces guerres que la renommée a déjà publiés dans tout l'univers. Il reconnaît le fils d'Avrée, le vieux Priam et le terrible Achille. Il s'arrête et ne pouvant retenir ses larmes : « Achate, dit-il, quel lieu n'a retenti, quelle contrée de la terre n'est pleine du bruit de nos malheurs ! Jusque dans ces déserts, le courage trouve sa récompense. Il y a des larmes dans les choses mêmes et ce qui est périssable frappe l'esprit. »
Les annales du monde offrent-elles un pareil exemple des vicissitudes de la fortune ? Quelle transition ! Avoir été proclamé le plus opulent souverain de l'Europe et être réduit à emprunter douze cents francs ; enfin s'être levé tout puissant dans le palais de ses ancêtres et se cacher fugitif dans le tombeau de ses enfants ! Sunt lacrymae rerum et mentem mortalia tangunt.
SARRANS
Histoire de la Révolution de 1848
N'avez-vous jamais rencontré de ces femmes décrépites, belles dames du temps jadis, couronnées en leur printemps par la poésie, par l'amour, et dont la dégradation afflige le coeur et l'appesantit sur la pensée des fins dernières ? Hélas ! les choses les plus nobles et les plus sublimes, la jeunesse, la beauté... Sunt lacrymae rerum !
Fancis WEY
De toute cette grandeur catholique, que restait-il ? Un moine obscur, n'ayant pour confident de ses peines qu'un inconnu et un étranger. Au milieu de cette froide solitude, parmi le silence qui nous environnait, je ne pouvais me défendre de ce regret qui, dans la fuite éternelle des choses d'ici-bas, nous attache aux monuments aussi bien qu'aux hommes d'autrefois : Sunt lacrymae rerum et mentem mortalia tangunt.
E. LABOULAYE
Journal des Débats

SUNT QUOS CURRICULO PULVEREM OLYMPICUM COLLEGISSE JUVAT
Il en est qui aiment à soulever sous les roues d'un char la poussière olympique (HORACE, liv. I, ode I, v. 3).
Les hommes ont tous un goût dominant, les uns aiment à conduire un char dans la carrière, les autres ambitionnent les dignités, un grand nombre aiment les richeses, d'autres les plaisirs ; ce qu'ambitionne Horace, c'est l'honneur d'être compté parmi les poètes.
Je tombai d'autant plus naturellement sur l'ode à Mécène d'Horace, qu'elle est au commencement du volume : Sunt quos curriculo pulverem olympicum collegisse juvat !. Il est des gens qui mettent leur bonheur à soulever la poussière du cirque. Pour moi, mon bonheur serait de ne pas sortir aujourd'hui ; et en même temps je pris mon chapeau et mes gants.
A. KARR
C'est précisément, milord, ce qui roule en ce moment dans la tête d'Hecter. Il n'a pas la manie de l'équitation, mais Sunt quos curriculo pulverem olympicum collegisse juvat ! C'est un char qu'il ambitionne, et il n'a ni argent pour l'acheter, ni adresse pour le conduire, s'il en avait un.
Walter SCOTT
L'Antiquaire

SUNT VERBA ET VOCES PRAETEREAQUE NIHIL
Des mots et des paroles et rien de plus.
Vers d'Ovide, qui peut s'appliquer à un grand nombre de discours.
Les événements de l'Irlande ont provoqué dans le parti tory d'assez profonds dissentiments. M. Peel est persuadé qu'abandonnée à elle-même, toute cette agitation finira par tomber. Il semble dire en regardant l'Irlande : Sunt verba et voces praetereaque nihil.
Revue de Paris
Il s'agit aujourd'hui, entre les peuples, de tout autre intérêt que de la modeste gloriole de quelques doctes et patients enregistreurs de mots, condamnés à se copier à tour de rôle depuis le commencement d'une langue jusqu'à sa fin, et la polémique des dictionnaires ne fera plus le même bruit qu'au temps de Ménage et de Furetière. C'est le cas de dire plus que jamai et dans une acception plus littéraires : Sunt verba et voces praetereaque nihil.
Ch. NODIER
On peut dire de Bernis ce disait Ovide : Sunt voces praetereaque nihil. C'est un léger ramage qui passe dans le bruit du vent, une ombre gracieuse qui fuit à la lumière, des fanfreluches de poésie, les échos d'une chanson, des fleurettes qui n'ont pas même brillé l'espace d'un matin.
Arsène HOUSSAYE
Quand un discours est tombé à la tribune de la bouche d'un véritable homme d'État, la polémique s'empare de l'oeuvre, elle la commente, elle la critique : à tout ce bruit qui s'élève et se prolonge, à ce conflit d'appréciations contradictoires, on reconnaît qu'il y a là autre chose que des mots et des sons, verba et voces praetereaque nihil ; on sent qu'il y a là un fait grave, important, qui termine une situation politique, pour en commencer une autre.
Revue de Paris
« Ne faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas qui vous fût fait à vous-mêmes », dit Jésus. « Aimez-vous les uns les autres », dit saint Jean. Voilà la vérité sociale.
« Rendez à César ce qui appartient à César », dit encore Jésus. « Soumettez-vous aux puissances », dit saint Paul. Voilà la vérité politique.
Pour le tiurplus, insensé qui s'en occupe, car il use son intelligence sur des mots et sur des sons : Verba, voces, nihil.
Ch. NODIER

SURGE ET AMBULA
Levez-vous et marchez ! (Évangile selon saint Mathieu, IX)
Jésus, étant monté sur une barque, repassa le lac de Génésareth et vint dans la ville qu'il avait choisie pour demeure. A peine y fut-il, qu'on lui amena un paralytique étendu sur son lit. Jésus dit au paralytique : « Mon fils, ayez confiance ; vos péchés vous sont remis. »
Aussitôt quelques-uns des docteurs de la Ioi dirent nt en eux-mêmes : « Cet homme blasphème. » Mais Jésus leur dit : « Pourquoi ces mauvaises pensées s'élèvent-elles dans vos coeurs ? Lequel est le plus aisé de dire à ce paralytique : Vos péchés vous sont remis, au de lui dire : Levez-vous et marchez ? Or, afin que vous sachiez que le Fils de l'homme a sur la terre le pouvoir de remettre les péchés : Levez-vous, dit-il alors au paralytique, emportez votre lit, et allez-vous-en dans votre maison. » Et sur le champ, le paralytique se leva et s'en alla.
Il n'y a point de figure de rhétorique qui soit jamais aussi persuasive que cette parole de Jésus-Christ à un malheureux perclus : Levez-vous et marchez : Surge et ambula.
LA HARPE
Il arrivera au roi ce qui arriva à César : Il viendra, il verra, il vaincra. La seule différence (et malheureusement elle n'est pas mince), c'est qu'il fera tout cela en beaucoup de temps ; à cela il n'y a pas de remède. Depuis Celui qui disait : Surge et ambula, on ne guérit plus subitement des maux affreux de vingt-cinq ans.
Joseph DE MAISTRE

SURGE TANDEM, CARNIFEX !
Lève-toi, bourreau !
L'empire de Mécène sur son maître fut porté à un tel point que, passant un jour sur le forum et voyant Auguste juger des criminels avec un air d'emportement, il lui fit passer ses tablettes sur lesquelles il avait écrit ces mots : Surge tandem, carnifex ! lève-toi, bourreau ! L'empereur prit en bonne part cette dure remontrance et descendit de son tribunal jusqu'à ce que sa colère fût apaisée.
Tout gouvernement qui réfléchit fera bien d'abréger ce triste règne de terreur (les lois contre la haute trahison), qui peut-être doit nécessairement suivre la découverte d'un complot, ou la répression d'une révolte ; soit par humanité, soit par politique, il ne doit pas attendre que la voix de la nation lui crie, comme Mécène à Auguste : Surge tandem, carnifex !
Walter SCOTT

SURSUM CORDA
Élevez vos coeurs.
Paroles que prononce le prêtre pendant la messe quelques instants avant l'élévation. Ces deux mots ne se rencontrent en général que dans Ie style noble.
L'enthousiasme et l'amour, ces deux seules véritables Muses divines, ne s'abaissent pas à satiriser le genre humain ; elles pleurent sur lui, s'il se souille ; elles lui chantent le sursum corda de l'espérance, s'il se décourage ou s'il se dégrade.
LAMARTINE
C'est réellement pitié, messieurs, que d'ouïr votre conversation. On ne saurait rien imaginer de plus mesquin, de plus prosaïque, de plus bourgeois. Ne vous plairait-il pas de vous livrer à une discussion d'un ordre plus élevé ? Debout, poètes ! Sursum corda ! Parlons d'art et de poésie. Je suis altéré d'une conversation artistique, j'ai soif d'esprit et d'intelligence.
Ch. DE BERNARD
Imaginez ce que sera une société où chacun garde un coeur tourné vers Dieu et un amour montant vers lui ;une société où tout semble crier par la voix des hommes et par la voix des choses : Sursum corda ! Par ces élévations et ces essors de l'amour ramené vers son centre, tous les coeurs vont en haut, tous les autours montent à Dieu ; et ce sursum corda de l'homme et de la société qui s'élève, c'est le progrès moral, et avec lui et par lui le vrai progrès humain.
Le Père FÉLIX
Quelque carrière que vous embrassiez, proposez-vous un but élevé, et mettez à son service une constance inébranlable. Sursum corda, tenez en haut votre coeur, voilà toute la philosophie.
V. COUSIN
M. Villemain jette, en terminant, ce cri auquel répondra toute âme capable de sentir le beau et d'aimer le bien : « Le lyrisme ne mourra jamais ! » Il ne mourrait en effet que si le divin se retirait de l'âme humaine. L'impression de ce livre (essai sur Pindare) est éminemment salutaire : c'est un grand sursum corda !
Henri MARTIN
L'élégant et consciencieux aristarque (M. Villemain), passe en revue la poésie lyrique chez tous les peuples, depuis Orphée jusqu'à Victor Hugo. Au milieu des préoccupations de la guerre, cet ouvrage, où se fait sentir le sursum corda, où les Pindares et les Tyrtées rendent hommage aux héros, où l'ode hébraïque mêle ses sublimités à celles de l'ode grecque, cet ouvrage inspiré de tous les nobles sentiments se fera lire comme un ouvrage de circonstance.
Hippolyte LUCAS
Être le poète de l'âme, représenter le spiritualisme dans l'art, le sursum corda poétique, c'est assez pour marquer sa place dans la poésie d'un siècle, et s'il y en a eu de plus écIatante, il n'en est pas de plus honorable.
DE PONTMARTIN

SUSTINE ET ABSTINE
Souffre et abstiens-toi.
Telle était la devise des stoïciens, tel était le but constant de tous leurs efforts : le silence des passions, un empire absolu de la raison sur toutes les affections charnelles, l'apathie en un mot, qui n'est pas une insensibilité stupide, mais une inviolabilité par laquelle l'homme est tout à fait hors d'atteinte des impressions corporelles. Un stoïcien disait : « O goutte, tourmente-moi tant que tu voudras ; jamais tu ne me contraindras d'avouer que la douleur soit un mal. »
La philosophie seule avait deviné depuis longtemps que toute la sagesse de I'homme était renfermée en deux mots : Sustine et abstine.
Joseph DE MAISTRE
La vraie vertu humaine n'est pas purement négative. Elle ne consiste pas seulement à s'abstenir de toutes les choses qui sont réprouvées par le droit et la morale ; elle consiste aussi et bien davantage, à faire acte d'énergie, de talent, de volonté, de caractère contre le débordement de toutes ces personnalités qui, par le seul fait de leur vie, tendent à nous effacer. Sustine, dit le stoïcien, et abstine ; souffrir, c'est-à-dire combattre, voilà le premier point ; s'abstenir, voilà le second.
PROUDHON
La Paix et la Guerre

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