Lettre "M"
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[ME->MH]

MEA CULPA
Par ma faute.
Mots du Confiteor, dont l'application est fréquente dans le langage familier.
Je croyais faire opposition à l'Empire, tandis que, malheureux, je faisais obstacle à la Révolution. Je voulais embarrer le chariot d'Ezéchiel, forcer la main à celui qui règne dans les cieux et qui gouverne les républiques, comme dit Bossuet ; et c'était envers l'humanité que je me rendais sacrilège ! J'en suis puni : Mea culpa !
PROUDHON
L'Invalide russe, qui s'exalte pour la liberté de l'Italie centrale et demande l'abolition complète des traités de 1815, ne fait qu'exprimer son irritation individuelle contre la France et l'Autriche. Sa doctrine pourrait même devenir très dangereuse pour la Russie, car si par hasard la question polonaise devait passer par une phase analogue à celle de la question italienne, il serait peut-être trop tard pour dire son mea culpa.
Le Siècle
Rome va tressaillir de joie. Un jeune savant, un écrivain qui lui a causé jadis quelques ennuis, et que, pour ce fait, elle a mis à l'index, M. Ernest Renan, prononce aujourd'hui son amende honorable, et afin de rendre sa conversion plus éclatante, pour que son mea culpa ait plus de retentissement, il se sert de l'organe du Journal des Débats.
L. JOURDAN

MEDIO DE FONTE LEPORUM
De la source même des grâces, des plaisirs (LUCRÈCE, Poème de la nature, liv. IV, v. 1126).
...Medio de fonte leporum
Surgit amari aliquid, quod in ipsis floribus angat.

Mais l'épine est cachée au sein brillant des fleurs ;
Ils sentent de l'ennui les plus secrètes douleurs... (Traduction de Pongerville)
Tels on nous représente ces heureux mortels entourés de tous les biens d'une nature opulente, sous les climats délicieux de l'Inde, s'abandonnant, au milieu des fleurs et des fruits, à une vie indolente. Cependant, du sein de ces affadissantes langueurs, l'apathie, l'ennui s'élèvent pour en corrompre l'enchantement. Medio de fonte leporum, surgit amari aliquid, quod in ipsis floribus angat.
J.-J. VIREY
Beaucoup de biographes ont répété que le moindre billet coûtait huit jours à Voiture. Mais il y a là trop d'aisance, d'esprit, de facilité prodigue ; tout y coule avec trop d'abondance, medio de fonte leporum, pour croire à tant d'aridité dans le procédé, à tant de souffrances dans l'enfantement.
Ch. LABITTE

ME, ME ADSUM QUI FECI !
C'est moi, moi qui l'ai fait ! (VIRGILE, Énéide, liv. IX, v. 427)
C'est un passage du célèbre épisode de Nisus et Euryale, chef-d'oeuvre de pathétique, où tous les genres de beautés poétiques sont réunis. L'intrépide Nisus, et Euryale, le plus beau de l'armée troyenne, unis par l'amitié la plus tendre, compagnons de périls et de gloire, veulent tenter ensemble quelque chose d'héroïque ; ils pénètrent pendant la nuit dans le camp des Rutules, massacrent un grand nombre de guerriers ensevelis dans le sommeil de l'ivresse, et s'apprêtent à revenir sur leurs pas. Mais le jour paraît, et un chef rutule, Volcens, à la tête de trois cents cavaliers, surprend Euryale. Nisus, caché dans l'ombre, lance deux flèches qui vont donner la mort à deux guerriers rutules, mais à la vue de Volcens; levant son épée sur Euryale, il s'élance de sa retraite en criant : « Me voilà, c'est moi qui ai tout fait : Me, me adsum qui feci ; tournez vos armes contre moi !... » Déjà le fer a tranché les jours d'Euryale. Nisus se précipite au milieu des ennemis, il ne cherche que Volcens, le tue, et, percé lui-même de mille traits, va tomber et mourir sur le corps de son ami.
Je ne souffrirai pas qu'on vous pende pour moi, et je suis toujours prêt à vous crier : Me, me adsum qui feci. Je déclarerai, quand vous voudrez, que moi tout seul j'ai fait la fatale tache, et que je n'ai point eu de complices.
P.-L. COURIER
Ce mensonge cruel du fabricant qui n'a pas fabriqué, de l'inventeur qui n'a pas inventé, attriste pour moi en grande partie tout l'intérêt de l'exposition. Comme on serait heureux de rencontrer derrière ces riches productions l'ouvrier intelligent qui les a faites : Me, me adsum qui feci.
J. JANIN
N'y a-t-il pas dans cette manière de traiter, une lacune regrettable ? Vous, Europe, vous traitez de la Roumanie, mais avec qui ? Avec la Roumanie ? Non, entre vous ! Eh bien, qu'arrive-t-il ? C'est que la peuple dont vous avez traité veut à son tour, lui aussi, être entendu ; il fait parler les évènements : Me, me adum qui feci ; me voilà, dit-il ; c'est moi, moi dont il s'agit, moi qui seul n'ai pas été appelé à donner ma signature à votre oeuvre, et qui la donne.
Léon PLÉE

MEMENTO QUIA PULVIS ES
Souviens-toi que tu es poussière.
Paroles que prononce le prêtre, le jour des Cendres. « Homme, souviens-toi que tu est poussière et que tu retourneras en poussière. » Cette pensée, inspirée par l'humanité chrétienne, se retrouve souvent dans les livres des Anciens. Horace a dit (liv. IV, ode VI, v. 16) : Pulvis et umbra sumus (Nous ne sommes qu'ombre et poussière).
Le frère revenait de quêter dans la ville ; c'était son tour de rôle ; il regagnait son couvent. Quand il fut près de moi, je faillis jeter un cri ; j'avais reconnu le jeune, l'excellent prédicateur de la veille à la cathédrale. Je le saluai : il ne me regarda point, mais il me rendit mon salut par ces mots : Memento quia pulvis es.
J. DE SAINT-FÉLIX
Le poète aussi a charge d'âmes. Il ne faut pas que la multitude sorte du théâtre sans emporter avec elle quelque moralité austère et profonde... Il laissera quelquefois le carnaval débraillé chanter à tue-tête sur l'avant-scène, mais il lui criera du fond du théâtre : Memento quia pulvis es !
Victor HUGO
Préface de Lucrèce Borgia
Homme d'esprit parfois excentrique, M. Gannal envoyait au jour de l'an jusqu'à cent mille cartes de visite, où se trouvait mentionnée sa qualité d'embaumeur. Sa politesse allait surtout chercher les personnes riches et âgées, auxquelles il semblait dire : Memento, homo, quia pulvis es. C'était cruellement anticiper sur le mercredi des Cendres.
Isidore BOURDON

MENS AGITAT MOLEM
L'esprit meut la matière (VIRGILE, Énéide, liv. VI, v. 727).
Dieu est l'âme du monde : répandue dans la terre, dans le soleil, dans la lune et les autres globes célestes, cette âme universelle donne la vie et le mouvement au monde : Mens agitat molem. Cette expression, par laquelle Virgile distingue la substance spirituelle de la substance matérielle, sert à désigner tout ce qui marque l'empire de l'esprit sur la matière et la suprématie de la pensée, de l'intelligence et du génie. Les juges de la maréchale d'Ancre, Léonora Galigaï, lui ayant demandé par quel sortilège elle exerçait tant d'influence sur Marie de Médicis : « Par l'ascendant d'une âme forte sur une balourde », répondit-elle.
Dans Télémaque, Fénelon explique ainsi le vers de Virgile : « L'âme universelle du monde est comme un grand océan de lumière : nos esprits sont comme de petits ruisseaux qui en sortent et qui y retournent pour s'y perdre. »
Dans toute assemblée humaine, il se forme un esprit général qui domine et meut la masse : Mens agitat molem.
BAUTAIN
Philosophie morale
Le poète, riche de ses illusions, n'est jamais seul dans la nature. Pour lui, le mens agitat molem, l'esprit animant la masse entière est pris au sérieux.
LEPELLETIER
Il me semble que l'existence et la marche des gouvernements ne peuvent s'expliquer par des moyens humains, pas plus que le mouvement des corps par des moyens mécaniques : Mens agitat molem.
Joseph DE MAISTRE
Vous voyez donc bien qu'une providence très sage a combiné entre eux les éléments pour les besoins des végétaux et des animaux. Elle échappe à nos sens corporels, mais elle s'y manifeste par ses bienfaits : Mens agitat molem, l'esprit modifie la matière.
BERNARDIN DE SAINT-PIERRE

MENS DIVINIOR
Le souffle divin (HORACE, livre I, satire IV, vers 42).
Poésie et versification sont deux choses bien difrérentes. Horace avertit de leur méprise ceux qui, faisant des vers réguliers, oseraient à ce seul titre prendre le nom de poètes ; pour être poète il faut deux choses : d'abord le mens divinior, l'étincelle sacrée, ou, comme dit Boileau « du ciel, l'influence secrète » et, de plus, le privilège de pouvoir dire naturellement de grandes choses, ce qu'Horace appelle Os magna sonaturum (VOIR cette locution).
Ce que tous les efforts réunis de la volonté ne sauraient produire, c'est la sensibilité innée, le coloris naturel, la flamme intérieure, mens divinior. Or, combien, s'intitulant poètes, ne sont, par l'absence de cette naïveté essentielle et faute d'une nature vraiment aimante, que des versificateurs spirituels, ou même que de froids et insipides rimeurs !
Revue de Paris
Laissons-les faire, ces enfants de la fantaisie et du caprice ; ils obéissent à tout propos au mens divinior ; ceux-là parlent moins haut et sont plus calmes en leur douleur, dont la douleur est plus durable.
J. JANIN
C'est la langue et la littérature de Rome qui ont formé notre langue et notre littérature. Ce rare bon sens, ce mens divinior de nos grands écrivains, cette justesse, cette précision, cette netteté qu'on admire dans leur style, ce caractère toujours un peu solennel de leurs composition, ne sont-ce point là des attributs qu'ils tiennent des Romains plus que des Grecs.
Revue de Paris

MENS SANA IN CORPORE SANO
Une âme saine dans un corps sain.
« Que peut-on demander de plus aux dieux, a dit Juvénal, que la santé de l'âme avec la santé du corps ? »
Proudhon a dit : La vertu est la santé de l'âme et la santé est la vertu du corps.
Rabelais, avec son humeur railleuse et joviale, a parodié ainsi cette maxime : « Mens sana non potest vivere in corpore sicco, une âme saine ne peut habiter dans un corps sec (qui ne boit pas). »
Raspail (De la Santé et de la Maladie) déveIoppe ainsi la pensée de Juvénal : il distingue quatre situations différentes dans lesquelles l'homme peut se trouver : une âme saine dans un corps sain ; une âme saine dans un corps malade ; une âme malade dans un corps sain ; une âme malade dans un corps malade. « Mens sana in corpore sano, voilà l'homme moral, l'homme modèle, l'homme fort, l'homme juste ; mens sana in corpore non sano, voilà l'homme malade et souffrant ; Mens non sana in corpore sano, voilà l'homme triste, mélancolique et affligé, il devient ou maniaque ou fou ; mens non sana in corpore non sano, c'est l'agonie, c'est le prélude de la mort. »
Enfin, La Rochefoucauld a dit : « La force et la faiblesse de l'esprit sont mal nommées ; elles ne sont en effet que la bonne ou mauvaise disposition des organes du corps. »
Un homme bien organisé et bien dirigé, qui sait se gouverner lui-même convenablement, tirera bon parti de son âme et de son corps : Mens sana in corpore sano.
BAUTAIN
Après la paix du coeur et la foi religieuse, est-il quelque chose de plus précieux, de plus indispensable que la santé ? Que les forces physiques viennent à faire défaut, et le travail, qui est aussi un élément de moralité, devient impossible, et les études sont interrompues, la carrière manquée, l'intelligence même compromise, car le corps aussi sert la pensée : Mens sana in corpore sano.
Roger DE GUIMPS
Madame D... m'a mandé quelquefois que vous vous portiez bien. C'est tout ce que je vous souhaite, car c'est la moitié du bonheur ; et l'autre moitié, mens sana, vous est acquise de tout temps.
P.-L. COURIER
Maintenant je suis heureux, nul homme vivant ne l'est davantage, et peut-être aucun n'est aussi content... Enfin, si je n'atteins pas le mentem sanam in corpore sano, j'en approche du moins depuis longtemps.
P.-L. COURIER
Les païens eux-mêmes trouvaient que l'homme n'est un beau spectacle que quand la beauté et la force de l'âme sont en harmonie avec la beauté et la force du corps : Mens sana in corpore sano.
DUPANLOUP
De l'Éducation

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